Money Mindset : les perceptions à changer

Money Mindset : changer ses perceptions

C’est l’épisode 37 de la ligne diagonale et aujourd’hui, je parle ENFIN de mon money mindset en tant qu’anticapitaliste. J’aborde le sujet épineux de la honte et de l’émancipation par la richesse. Et je te parle d’un cours universitaire gratuit qui rassemble des études sur le bonheur.

Mets ça dans tes oreilles!

 

Richesse, exploitation et surconsommation

Depuis la première saison du podcast que je sais qu’il faut que je fasse un épisode qui parle de money mindset et des perceptions que j’ai par rapport à l’argent. Évidemment, c’est un sujet qui rend le monde bennnn mal à l’aise parce que c’est pas tout le monde qui a eu la même éducation financière, qui a le même revenu, qui a les mêmes objectifs, et qui est parti du même endroit en termes d’univers familial et d’héritage.

Pis je veux en parler parce que… y’a beaucoup d’incompréhension quand je dis que je suis anticapitaliste, quand je me positionne par rapport à l’argent en tant qu’entrepreneuse. Je me suis déjà fait dire “Je veux pas embarquer dans ton univers parce que je veux pas vivre dans la pauvreté pis j’aime ça voyager.” Pis ça m’a fait réaliser à quel point il y a des préjugés au sujet des gens qui ne visent pas la richesse comme but ultime.

C’est pour ça que je me suis dis “oupelaille”, faut que je parle de money mindset et de ma relation à l’argent.

Si tu me suis sur Instagram, tu le sais que je partage souvent des memes en stories qui vont rire de la richesse et du capitalisme. Mais, une chose est sûre, je ne suis pas contre l’argent. Je trouve même que c’est un système d’échange qui est efficace. Par contre, je suis contre l’exploitation et la surconsommation.

Ce que je considère comme de l’exploitation, c’est d’échanger notre force de travail, notre intellect et nos compétences pour que d’autres personnes en tirent un bien plus grand profit que nous. J’en ai déjà discuté avec Jasmine Touitou dans l’épisode sur l’anticapitalisme et l’entrepreneuriat

Ce que je considère comme de la surconsommation, c’est de consommer au-delà des ressources renouvelables ou de consommer bien au-delà du nécessaire. Bref, tu peux bien avoir un iPhone, mais sans changer d’ iPhone tous les 2 ans. Tu peux bien avoir un ou deux sacs à main de designer, mais pourquoi il t’en faudrait 64? Tu peux bien avoir une paire de louboutin, mais j’espère que tu les portes vraiment.

Ce que je n’aime pas, ce n’est pas la richesse, c’est comme elle est acquise dans certains cas (Est-ce que les pratiques sont éthiques? Est-ce que ces gens payent convenablement les gens qui travaillent pour elleux? Ou est-ce qu’iels payent leurs factures, point?) et comment elle est redistribuée (Est-ce que ça améliore la communauté dans laquelle on vit ou est-ce que les riches font juste hoarder leur argent?)

Les riches se plaignent d’être tenus à de hauts standards, mais j’espère!!! Je te donne un exemple. Si tu as peu de moyens financiers et/ou que ton corps ne correspond pas aux standards dictés par la société, est-ce que je vais te juger d’aller magasiner chez Shein, qui est reconnu pour ses pratiques douteuses? Non.

Si tu es riche et que tu magasines chez Shein, est-ce que je vais te juger? Bien sûr que oui. Parce que avoir les moyens financiers ET choisir de magasiner là, c’est de crier haut et fort: “Je m’en fous d’exploiter des communautés plus pauvres, et je m’en fous de détruire la planète.”

Le contexte a une influence sur le jugement qu’on porte sur certains comportements. La richesse donne le privilège de choisir. Donc oui, si les riches font de mauvais choix, je pense qu’iels sont plus accountable. Parce que ce sont des choix libres et conscients.

Avoir ces choix-là, justement, est-ce que ça rend plus heureux et heureuse?

 

Est-ce que l’argent rend plus heureux et heureuse?

Je me suis basé sur le cours The Science of Well-Being par l’université Yale aux États-Unis. C’est un cours accessible gratuitement. 

Ce cours-là présente plusieurs études en lien avec le bonheur. Les professeurs, chercheurs et chercheuses, se sont posé les questions: qu’est-ce qui rend les gens heureux? Ils ont évalués plusieurs facteurs qui font partie de ce que les gens pensent qui rend heureux:

  • Avoir beaucoup d’argent
  • Trouver l’amour / se marier
  • Atteindre notre idéal de beauté

Les résultats sont vraiment intéressants et je te conseille vraiment de prendre un moment pour suivre ce cours-là. J’ai beaucoup appris.

Donc, est-ce que l’argent rend plus heureux? Un peu, mais pas beaucoup une fois que tes besoins de base sont comblés. Si tu es dans une situation où tu n’as pas l’eau courante et que tu ne manges pas à ta fin, avoir plus d’argent et finalement combler ces besoins va te faire faire un big jump dans ton niveau de bonheur. C’est bien certain. Mais si tu as déjà d’un certain niveau de confort, ton niveau de bonheur n’augmentera plus, même si ta richesse augmente.

Est-ce que le luxe, lui rend plus heureux? Non. Les matérialistes ont un degré de satisfaction moins élevé que les non-matérialistes. Aussi, les matérialistes ont plus de troubles de santé mentale que les non-matérialistes. (C’est pas moi qui le dis, ce sont des études qui le prouvent. C’est dans la semaine 2, partie 3 du cours de Yale.)

Pourquoi?

 

Le cerveau utilise des points de références

On évalue constamment les choses en relation et en comparaison avec d’autres choses.

Par exemple, encore dans le cours de Yale, iels ont évalué le degré de satisfaction, de bonheur, des athlètes médaillé·es. Iels ont remarqué que les athlètes qui gagnent des médailles d’argent sont moins heureux que ceux et celles qui gagnent ses médailles de bronze. Pourquoi? Parce que l’argent se dit “fuck, j’étais si proche d’avoir l’or.” Tandis que le bronze se dit “Fuck, j’ai failli pas avoir de médaille.” C’est une question de comparaison.

C’est pour ça que si tu demandes à quelqu’un quel salaire le rendrait heureux, s’il gagne 30K$, il dira 100K$. Si tu lui poses la même question une fois qu’il fait 100K$, il va répondre 250K$. En 1999, Van Praat et Frijters ont mesuré cette augmentation: lorsque ton revenu augmente de 1$, ton revenu désiré augmente de 1,40$. Et c’est pour ça que des gens comme Jeff Bezos ou Elon Musk continuent de travailler, j’imagine. Ils cultivent l’insatiabilité qui est générée par la comparaison, par l’ego.

Des études ont même prouvé que la satisfaction que tu éprouves à faire ta job baisse plus les gens qui font la même job que toi gagnent plus d’argent.

Des chercheurs et/ou chercheuses ont fait 2 propositions à des étudiants et étudiantes de Harvard et leur ont demandé de choisir entre les 2 scénarios suivants :

  1. Être payé·e 50K$, mais les autres personnes avec le même emploi et la même ancienneté sont payées 25K$
  2. Être payé·e 100K$, mais les autres personnes avec le même emploi et la même ancienneté sont payées 250K$.

Plus de 56% de personnes ont choisi la première option et ont décidé de cracher sur le 50K$ de plus pour éviter d’être les moins bien payé·es.

C’est ce que je n’aime pas par rapport à l’argent. L’ego passe avant les besoins réels.

 

Richesse et honte

Je ne sais pas si vous connaissez la chercheuse Brené Brown. C’est une autrice et chercheuse très connue qui s’intéresse à la honte. Dans son livre Dairing Greatly, elle mentionne que le besoin d’être célèbre, celui d’être riche ou d’être admiré, est un comportement qui provient de la honte profonde d’être ordinaire.

La honte de ne pas être assez pour être vu·e et aimé·e, et pour cultiver une raison d’être. Parce que la culture et les systèmes ambiants (Oui je parle du patriarcat et du capitalisme), ce qu’ils nous disent, c’est qu’une vie ordinaire est une vie qui n’a pas de sens.

Tout ça vient de la culture du manque. Ne jamais être assez mince, assez riche, assez populaire, assez occupée, assez connue. La fameuse insatiabilité, c’est la peur de ne jamais être suffisant·e.

Vivre dans le monde capitaliste n’a jamais été facile, et les dernières années avec la pandémie, l’inflation, les guerres, etc., n’ont pas aidé à nous faire sentir en sécurité. Ça nous a entraîné·es à accumuler des ressources pour faire face au pire. On a perdu confiance.

Brené Brown va même jusqu’à dire que vouloir être riche, c’est une réaction à un stress post-traumatique. C’est relié au fait que tu penses que les autres ne seront pas là pour toi, que la communauté ne sera pas là pour toi. 

La façon de surpasser la peur du manque, ce n’est pas l’abondance, c’est le assez, c’est le wholeheartedness.

Donc, mon money mindset, ce n’est pas de vivre dans le minimalisme absolu et la pauvreté,  c’est de savoir se détacher de l’addiction à l’argent causé par la peur du manque, reconnaître notre valeur en tant qu’être humain à l’extérieur du système capitaliste, et ne pas se lancer dans une course sans fin pour combler un manque à l’intérieur de nous. 

 

Une chose est certaine, c'est qu'il y a une marge entre s'émanciper et participer à un système oppressif. - Annie Picard

 

Richesse et émancipation

“Oui, mais Annie, la richesse, surtout pour les femmes, ça veut dire l’émancipation. Être une femme riche, c’est féministe!” Je ne peux pas laisser de côté cette réflexion parce que je sais qu’on va me la ramener sinon.

Oui. Je suis d’accord qu’être riche pour une femme n’a pas la même signification que pour un homme. On connaît le passé: les femmes ne pouvaient pas ouvrir de comptes en banque sans leur mari, etc., etc. Oui. Être autonome par rapport à son argent, ne pas dépendre d’un homme pour subvenir à ses besoins et à ses désirs, c’est quelque chose qu’on doit aux féministes qui se sont battues avant nous. Et c’est quelque chose pour laquelle l’équité n’est pas atteinte encore, qu’on pense aux écarts salariaux ou qu’on regarde les listes des gens les plus riches au monde… on se rend bien compte que la richesse est encore un boy’s club.

Là où pour moi ça coince, c’est lorsque la richesse est présentée comme la seule option à l’émancipation et à la liberté.

Ça revient à la fameuse question: combien d’argent ça prend, pour être riche? Est-ce que t’es riche à 100K? 250K$ 1M$? Y’a pas de réponses universelles à cette question-là.

Une chose est certaine, c’est qu’il y a une marge énorme entre s’émanciper, et participer à un système oppressif. Si pour t’émanciper du patriarcat, tu dois exploiter la force de travail d’autres êtres humains… as-tu vraiment gagné la bataille?

À mon avis, quelque chose qui rendrait la richesse plus juste, ce serait l’instauration d’un revenu minimum garanti. Ça veut dire que le gouvernement verserait un montant d’argent égale pour tous et toutes, à tous les citoyens et citoyennes. Évidemment, ça demanderait une énorme réforme de la fiscalité. Ça se ferait pas du jour au lendemain, comme tout changement.

Les détracteurs de cette idée-là disent: “Ah mais personne ne va vouloir travailler!”. De dire ça, c’est de penser que la majorité des gens n’ont pas d’aspiration et qu’iels se contenteraient toustes du minimum. C’est aussi d’admettre qu’on vit dans un système d’exploitation où il n’y a pas d’autres options que d’échanger sa force de travail pour sa survie. Que la seule raison pour laquelle les gens font des choses, c’est pour survivre.

Mais toi, tu pourrais aussi survivre sur un salaire beaucoup moindre, right?… mais tu le fais pas. Parce que tu as des désirs, des ambitions. Pourquoi penses-tu que les autres sont si différents de toi? Et si c’était le cas… pourquoi est-ce que ça te dérange? As-tu besoin des pauvres pour te comparer?

 

En résumé, je ne suis pas contre l’argent ni la richesse. Je suis pour une meilleure répartition de la richesse, une utilisation responsable et communautaire de celle-ci. Je prône surtout une émancipation du système capitaliste qui nous brainwash à vouloir toujours plus, à l’infini, parce que c’est comme ça qu’on va atteindre une liberté qui va beaucoup plus loin que de nous libérer du patriarcat.

Et toi? Quel est ton money mindset? Quel est ton rapport à l’argent? Laisse-moi savoir en commentaires.

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