Cette semaine, on s’interroge sur ce que ça veut dire d’être féministe en business et on se pose plein de questions. Est-ce que l’emploi des termes “entrepreneuriat au féminin” est une bonne ou une mauvaise chose? Qu’est-ce que ça sous-entend? Devrait-on dire entrepreneure ou entrepreneuse?
Mon invitée Emma Nubel est spécialiste des mots. Elle se dit acribologue du web. De quessé? L’acribologie, c’est la précision et l’exactitude. C’était donc la bonne personne pour creuser ces questions et parler de féminisme.
Mets ça dans tes oreilles!
Faut-il dire entrepreneuse ou entrepreneure?
Bon, il faut bien répondre à la question que tout le monde se pose! Faut-il dire entrepreneuse ou entrepreneure?
Même si la question fait débat, il n’y a en fait qu’une seule bonne réponse: entrepreneuse. Et il ne s’agit même pas d’un enjeu féministe, c’est simplement que, dans la grammaire, lorsqu’un mot au masculin se termine en “eur”, le féminin se termine en “euse”. Voilà, voilà.
Mais… on peut quand même en parler. 😆 Car si on n’argumente que sur la grammaire traditionnelle, on devra dire que le masculin l’emporte sur le féminin. Et je suis ne suis pas vraiment down avec ça. 😉
Il y a donc 2 courants de pensée. Le premier est en faveur du “euse”, qui permet d’entendre le féminin à l’oral. Cela permet donc de rendre les femmes plus visibles. Le second courant préfère le “re”, car, justement, cela ne fait pas la distinction entre le féminin et le masculin à l’oral, et permet donc de sortir de la binarité homme/femme.
Bon, il y aussi ceux et celles qui refusent d’utiliser le mot entrepreneuse, car iels trouvent que « ça ne sonne pas bien”, sans que ce soit relié au désir de sortir de la binarité, mais plutôt à cause d’une mauvaise acceptation de la féminisation des termes. Ce qu’on pourrait qualifier de légère misogynie internalisée, à mon avis.
Personnellement, j’utilise le mot entrepreneuse.
L’entrepreneuriat au féminin
Qu’en est-il de l’expression « entrepreneuriat au féminin”? Est-ce problématique?
Il n’y a pas de bonne réponse, mais selon Emma (et moi-même), c’est important de prendre conscience des stéréotypes qui sont sous-entendus derrière l’expression. En spécifiant qu’il s’agit d’entrepreneuriat féminin, cela laisse croire qu’il y a certains domaines, ou certaines façons de faire des affaires qui sont spécifiques aux femmes. Ça crée une certaine stigmatisation, comme s’il y avait un entrepreneuriat alternatif qui serait complètement différent de l’entrepreneuriat standard.
La dualité, c’est qu’on veut être vues, mais qu’on ne veut pas se stigmatiser nous-mêmes.
“Il faudrait réfléchir dans l’autre sens et dire “un homme entrepreneur” pour montrer le risible de la situation”, dit Emma.
En quoi le patriarcat influence-t-il notre façon d’entreprendre?
Le patriarcat fait en sorte que les femmes sont moins encouragées à oser et à prendre leur place, même si elles sont tout à fait compétentes et outillées pour le faire. La confiance en soi et la négociation sont des compétences qui sont moins enseignées aux personnes socialisées comme femmes durant leur enfance.
Différencier l’entrepreneuriat féminin de l’entrepreneuriat “tout court” est teinté de notre façon de voir les femmes sous le patriarcat. Durant ses études au Master en Genre, littérature et culture, Emma a fait ses recherches sur la manière dont le genre d’un·e artiste influence sa réception critique.
En d’autres mots, lorsqu’on sait que l’artiste est une femme ou un homme, notre interprétation de son oeuvre est totalement différente. Par exemple, une tache rouge sera associée aux menstruations et à l’accouchement si on nous dit que l’artiste est une femme, alors qu’elle sera associée à la violence et à la guerre si on nous dit que l’artiste est un homme. 🤷🏻♀️
4 points importants pour une entreprise féministe
Quelles seraient donc de bonnes pratiques pour une entreprise féministe? Selon nous, la meilleure façon d’être féministe, c’est d’inclure tout le monde, peu importe leur orientation de genre.
On pourrait donc résumer en 4 points:
- Questionner les oppressions, même celles qu’on ne subit pas
- S’affirmer dans sa valeur, son rapport à l’argent et à l’autre
- Être inclusif·ve et accessible dans nos contenus
- Définir nos propres règles, au-delà des systèmes en place.
En somme, on vise un féminisme intersectionnel, c’est-à-dire la reconnaissance que certaines personnes peuvent vivre plus d’une oppression en même temps. Si on prône un féminisme qui ne s’adresse qu’aux riches femmes blanches cisgenres, cela est problématique.
Le but n’est pas que les femmes prennent la place des hommes, c’est qu’il n’y ait plus cette binarité, cette dualité.
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Attention au “féminisme washing”
Évidemment, il faut que vous incarniez les valeurs féministes que vous prônez. L’objectif n’est pas de se rallier à la cause parce que c’est à la mode ou parce que cela vous fera vendre. C’est ce qu’on appelle du “washing”, soit de s’associer à une cause pour le marketing et non par valeur.
Sans promouvoir une pureté militante, il faut savoir faire preuve d’humilité et se responsabiliser par rapport à nos pratiques. C’est d’ailleurs une des règles qui fait partie d’un brave space, comme mentionné au premier épisode. 😉
Bonnes pratiques à mettre en place pour adopter une approche féministe en entreprise
- Adopter une communication inclusive – Cela veut dire prendre en compte les personnes gender fluid et non binaire, en plus des hommes et des femmes.
- S’assurer d’être accessible – Par exemple, ajouter des sous-titres et remplir les balises Alt.
- Questionner les mots qu’on utilise et ce qu’ils sous-entendent.
- Avoir l’humilité de dire qu’on ne sait pas tout et se questionner sur nos privilèges.
- Faire preuve de plus d’empathie.
Mentionnés dans l’épisode
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- Suis Emma sur Instagram @acribologueduweb
- Le livre Féministe Washing, de Léa Lejeune
- Rejoins-moi sur Instagram pour en discuter @_slasheuse.co
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