Est-ce que c’est payant de travailler comme pigiste pour des organismes à but non lucratif? et faut-il absolument faire des rabais sur nos services quand on travaille avec des OBNL? Mais surtout, qu’est-ce que ça implique de faire du marketing et de la rédaction persuasive quand notre but n’est pas de vendre, mais plutôt de sensibiliser ou d’amasser des dons?
J’ai reçu Charles Saliba-Couture, rédacteur et copywriter pour des OBNL, pour en parler.
Mets ça dans tes oreilles!
Est-ce possible d’être rentable quand notre clientèle est un organisme à but non lucratif?
Charles a décidé d’écrire exclusivement pour des organismes à but non lucratif. C’était important pour lui que son travail ait un sens. Mais, évidemment, la question des revenus et de la rentabilité de son entreprise lui a créé quelques craintes au début de son lancement comme travailleur autonome.
En effet, les organismes ont la réputation d’être des clients qui ont peu de budget à consacrer aux projets, particulièrement en ce qui a trait au marketing. Charles avait eu écho d’autres freelancers qui avaient fait le choix de délaisser cette niche parce qu’iels ne la trouvaient pas viable financièrement, et que l’implication des comités administratifs dans les processus créatifs était parfois lourde à gérer.
Finalement, il en est venu à la réalisation que oui, il pourrait faire plus de profit en se spécialisant dans une autre niche, mais qu’il est tout à fait possible d’avoir une entreprise rentable en offrant ses services aux OBNL.
Faut-il faire des tarifs préférentiels pour les organismes à but non lucratif?
Il n’y a pas de bonne réponse à cette question. Certaines personnes choisissent d’offrir un tarif spécial parce qu’elles travaillent avec divers types de clientèles. La baisse de revenus occasionnée par ces spéciaux peut donc être absorbée par les revenus provenant d’autres clients.
Charles, de son côté, a plutôt décidé de faire des choix, car en écrivant exclusivement pour des organismes, l’option d’offrir des tarifs préférentiels ne serait pas viable.
La solution?
Adopter le pricing de valeur, dont Alexe Martel parle dans son livre. En révisant ses offres de services pour valoriser son travail, il collabore avec des clients qui ont un budget adéquat pour le travail à effectuer.
Pour lui, il s’agit de faire de l’éducation sur la valeur que la rédaction persuasive peut apporter plutôt que de baisser ses tarifs.
Qu’est-ce qui est différent entre écrire pour une cause plutôt que pour un produit ou un service?
Est-ce que le copywriting pour des causes sociales est différent de celui pour les produits et services?
À la base, les techniques de persuasion sont les mêmes. Il faut connaître son audience, savoir transmettre des émotions dans ses textes, et connaître les objections et les freins qui pourraient empêcher les gens de passer à l’action.
Toutefois, on ne retrouve pas les arguments de garanties, de promotions, de gratuité dans le domaine des causes sociales. Les défis sont différents.
Effectivement, les bénéfices ne sont souvent pas aussi clairs et directs pour les personnes à qui on s’adresse lors de la promotion d’une cause versus lors de la promotion d’un produit ou d’un service. Par exemple, si on demande aux gens de faire des dons pour venir en aide aux victimes de la guerre en Ukraine, les gens à qui on s’adresse ne sont pas directement touchés. Ils ne verront pas de bénéfices directs sur leur qualité de vie s’ils passent à l’action.
Par contre, la rédaction persuasive pour des causes sociales peut jouer sur différents besoins qu’ont tous les humains:
- se sentir utiles
- participer à quelque chose de plus grand que soi
- faire une différence
- …mais aussi se sentir moins coupable par rapport à ses privilèges.
Mais alors…
Faut-il jouer sur les sentiments de culpabilité ou de pitié pour persuader?
Jadis, les organismes jouaient beaucoup sur les sentiments de culpabilité ou de pitié du grand public afin d’amasser des dons pour leurs causes. Maintenant, ce sont des techniques qui fonctionnent moins bien.
Charles propose plutôt d’avoir des calls to action concrets, de ne plus s’en tenir à la sensibilisation et aux promesses floues comme “Faire une différence”. Les rédacteurs et rédactrices pour les organismes à but non lucratif doivent utiliser l’humour et être concrets dans leur appel à l’action.
Pour aller plus loin, tu peux:
- Lire l’article Stop Raising Awareness Already, d’Ann Christiano et Annie Neimand
- T’inspirer de l’humour de la campagne Radi-Aid
Revaloriser le marketing pour les causes sociales
Beaucoup d’OBNL n’ont pas le temps ni le budget pour former leurs employé·e·s au marketing. Les subventions sont attribuées par projets, et celles-ci sont donc constamment à la recherche de financement.
Il faut changer les mentalités des programmes de subventions, car sans communication ni marketing, la cause ne se rend pas aux oreilles et aux yeux du public. Revaloriser le marketing pour les organismes, c’est cesser de lui donner un rôle secondaire dans l’atteinte des objectifs et de le considérer comme un service optionnel.
Le marketing et la rédaction persuasive ne servent pas qu’à vendre. Ils servent à persuader les gens de passer à l’action. Signer une pétition, s’impliquer bénévolement, faire un don sont toutes des actions qui demandent de faire preuve de persuasion.
Comment se protéger émotivement lorsqu’on travaille pour des causes difficiles?
Ça peut être épuisant pour certaines personnes, particulièrement celles qui travaillent comme employées dans les OBNL, de porter les causes. Ça les force à les voir, à voir les êtres vivants qui souffrent, les problèmes environnementaux, etc.
Parfois, on peut ressentir de la culpabilité d’être heureux ou heureuses. Pourtant, comme je le disais dans un épisode précédent, la joie est un acte de résistance et est essentielle à la poursuite d’objectifs plus grands que soi.
Les organismes ont aussi beaucoup de belles histoires à raconter.
Conseils pour les rédacteurs et rédactrices qui veulent collaborer avec les OBNL
- Garder tes prix à la hauteur de la valeur que tu apportes.
- Utiliser l’humour et ne pas juste rester dans le sérieux, même si la cause est sérieuse.
- Assurer une cohérence dans tes actions, pour ne pas tomber dans le washing, mais accepter qu’un alignement parfait est impossible.
On peut être très critique sur certaines incohérences des OBNL, très souvent avec raison, mais si on est honnête, il faut admettre qu’on a aussi des incohérences à l’échelle individuelle.
Pour suivre Charles Saliba-Couture
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J’ai adoré cet épisode ! Je découvre ton podcast par la même occasion.
J’ai déjà échangé avec Charles sur LinkedIn et les causes sont un grand sujet !
Son parcours est très inspirant. C’est agréable de voir que le marketing sert des causes !
Et bien je te souhaite la bienvenue sur le podcast Cécile! Contente de te voir par ici. Merci d’avoir pris le temps de me laisser un commentaire, c’est full apprécié.